RSS Feed

Le texte interdit : Europe, le sursaut c’est urgent !

Écrit le 2 mai 2013 par Éric Thouzeau

Le « texte interdit » complet qui ne pourra pas être présenté au vote des militants du PS

71578410liberte-d-expression-jpgDans le cadre de la convention Europe du Parti socialiste, les militants de « Maintenant La Gauche, le social au cœur » (motion 3) ont souhaité proposer aux militants socialistes de s’engager pour défendre une réorientation profonde de la construction européenne. Le Bureau national du PS a refusé que ces propositions contenues dans un texte alternatif « Europe, le sursaut c’est urgent » soient soumises au débat, et ce en contradiction même avec les règles fixées pour cette convention (circulaire n°1387 du 17 avril). Le Parti socialiste est devenu la force majeure de la gauche en étant un parti de débats, où différents courants de la gauche peuvent échanger et confronter leurs points de vue. Toute conception monolithique du PS est vouée à l’échec, et ne peut que conduire à de fortes déconvenues. Voici ce texte que les militants socialistes n’auront pas le droit de voter. Comme l’écrivait le journal Le Monde (28 avril 2013), « l’objectif de l’exécutif est donc simple : …empêcher l’éclosion d’une résolution alternative, de peur que celle de la direction du parti ne soit minoritaire à l’issue du vote militant ». E.T

Parce que nous aimons l’Europe, parce que nous l’avons rêvée, voulue et construite nous n’acceptons pas son orientation actuelle. Comme nous, nos concitoyens sont inquiets. Le chômage et la précarité explosent et le pouvoir d’achat baisse. Les politiques d’austérité, que des institutions non démocratiques imposent aux États, créent un climat de défiance à l’endroit de l’Europe.

L’Europe s’est construite sur un rêve de prospérité partagée. Elle est aujourd’hui l’otage de politiques néo-libérales et de dérives technocratiques qui l’ont affaibli. On en connaît les conséquences : accroissement des inégalités, remise en cause en cause du modèle social acquis de haute lutte par les mouvements ouvrier et progressistes, démantèlement des capacités d’intervention de la puissance publique, réduction du périmètre des services publics.

Les peuples eux aussi sont mis en concurrence. Ils subissent l’austérité, inacceptable et dangereuse. Aucune solidarité effective, aucun projet commun ne donne sens à ce qui doit être la grande ambition progressiste du 21e siècle. L’intégration politique fait du surplace.

Les  principes démocratiques de base sur lesquels l’Europe s’est fondée sont également remis en cause : la troïka, qui impose ses choix à une grande partie de l’Europe, sans aucune légitimité, sans rendre de comptes à quiconque, en est l’illustration la plus criante.

La faiblesse persistante de la croissance, la désindustrialisation globale, la domination de la finance sur l’économie réelle ne tombent pas du ciel. Elles sont la conséquence de choix économiques et politiques impulsés par les conservateurs et les libéraux. Ils ont accéléré l’accumulation de la dette publique. Les sociaux-démocrates ont eux-mêmes parfois accompagné cette spirale.

On nous avait promis l’Europe prospère, elle est austère. On attendait l’Europe démocratique, elle continue à être oligarchique. Quant à l’Europe sociale, elle est sortie des priorités.

Une alternative est possible. Pour réussir, le combat européen que nous menons doit être assumé politiquement par notre Président, par notre Parti. François Hollande a raison lorsqu’il se dit prêt à une “tension amicale” avec la droite allemande. La confrontation avec les droites européennes est nécessaire. C’est aujourd’hui qu’il faut construire un rapport de force avec les conservateurs, à commencer par leurs chefs de file Madame Merkel et Monsieur Cameron.

Les critiques convergent contre les politiques d’austérité. Les peuples en premier lieu, mais aussi désormais, le FMI, l’OCDE,  le BIT, des économistes de toutes origines et plus récemment le commissaire général à l’investissement, ont tous pointé la nécessité d’une relance coordonnée en Europe. Ailleurs, certains pays ont osé franchir le pas comme les États-Unis ou le Japon qui font le choix de la relance. Plus récemment encore c’est le Gouvernement de coalition des Pays-Bas qui a mis un coup d’arrêt à l’austérité sous l’utile pression des partenaires sociaux.

Si la gauche ne propose pas au plus vite une réorientation profonde et radicale de la construction européenne, c’est l’Union qui sera bientôt en danger. Le sursaut en Europe, c’est urgent.

 1. La question sociale avant tout : vers un Traité Social Européen.

L’emploi et le pouvoir d’achat sont la préoccupation première de nos concitoyens. Malheureusement, la question sociale est restée à la remorque de la construction européenne. La lutte contre le chômage et les inégalités doit être la priorité de la prochaine étape de la construction européenne. Le “traité social européen”, notamment porté par la confédération européenne des syndicats (CES) doit donner pour buts aux politiques communautaires l’amélioration des conditions de vie et de travail, la qualité des emplois, la lutte contre les discriminations à l’embauche et dans les rémunérations, le dialogue social, le développement durable. Il doit garantir à tous les salariés dans l’Union européenne les droits fondamentaux que sont les droits du travail et le niveau de protection sociale, et instaurer le principe de la clause la plus favorable.

Mais surtout, et là est l’urgence, il doit fixer un cadre de convergences progressives vers le haut des standards sociaux les plus importants comme la durée légale du travail, le salaire minimum. La création d’un SMIC dans chaque pays est importante mais ne saurait suffire pour combattre le dumping social. L’écart entre les SMIC doit être réduit pour se rapprocher du taux le plus élevé.

Dans le cadre des traités existants, il faut interdire les pratiques de rémunération selon le « principe du pays d’origine » que la défunte directive Bolkestein voulait consacrer. Il faut  exiger l’application de la directive « travailleurs détachés » et fixer un principe clair : l’obligation de respecter les lois et conventions collectives du pays où s’effectue le travail.

  2. Suspendre le pacte de stabilité : la croissance et l’emploi d’abord.

La priorité à la question sociale va de pair avec l’impératif de relance de l’économie. Malheureusement, le pacte de stabilité et le TSCG sont deux verrous qui interdisent désormais aux gouvernements de disposer des moyens d’action nécessaires pour faire face à la crise. Le pacte de stabilité doit être immédiatement suspendu. Le rythme de réduction des déficits imposé par la Commission européenne finira par provoquer des coupes sombres dans des dépenses publiques et sociales essentielles. L’austérité a démontré son inefficacité: elle contribue à augmenter la dette, pas à la réduire. Les peuples, les États et l’Union ne survivraient pas à la poursuite de cette politique suicidaire.

Le pacte de stabilité doit ensuite être réformé. Les dépenses d’investissements doivent être  exclues du calcul des déficits, son fonctionnement doit rejeter la logique de sanction et introduire celle de  coopération. Le dogme du 3%, chiffre sans aucune valeur économique, doit être aboli.  Le calendrier de réduction des déficits doit être réaliste et tenir compte du cycle économique et de la nécessité de lutter contre le chômage.

  3. Liquider la dette indigne : la BCE doit prêter directement aux États

Dans tous les pays européens, la montée de la dette publique est en premier lieu liée au déploiement des politiques de l’offre, centrées sur la baisse conjointe des dépenses publiques et des impôts. Les mesures fiscales favorables aux plus aisés ont essentiellement favorisé l’épargne des riches et n’ont pas provoqué l’effet annoncé sur la croissance. Il en a résulté une baisse des recettes fiscales et une montée des déficits. La crise a en second lieu fait exploser la dette à partir de 2008. Renonçant à prêter directement aux États, les banques centrales ont prêté aux banques qui elles même ont prêté aux pays avec des taux d’intérêt exorbitants, s’enrichissant au passage sur le dos des contribuables et des citoyens. Ces taux d’intérêt particulièrement élevés ont été des éléments déterminants de l’explosion de l’endettement. Une large part des dettes souveraines peuvent être ainsi considérées comme «  illégitimes ».

Le ralentissement de l’activité a encore amenuisé les recettes fiscales tandis que la socialisation des pertes des banques, responsable de la crise financière, a mis à contribution les finances publiques et les contribuables. Les rentiers, détenteurs de la dette publique et privée, ont doublement profité de cette situation. Ils ont tout d’abord  bénéficié des baisses d’impôts qui ont creusé les déficits. Ils ont ensuite touché les intérêts de la dette qu’ils détiennent… et qui a financé les cadeaux fiscaux dont ils ont profité pour spéculer. Nos concitoyens ont bien de quoi s’indigner ! Une grande partie de la dette est une dette indigne, causée par des politiques qui sont à l’origine de la crise et qui continuent à être vantées par des promoteurs n’ayant de cesse de mettre cette crise sur le dos d’un modèle social européen trop coûteux !

C’est cette dette indigne, à laquelle il faut s’attaquer.

Au-delà, Il faut distinguer la bonne dette, celle qui finance le modèle de développement durable, de cette mauvaise dette. Cela justifie que, dans de nombreux pays, il faille restructurer la dette pour libérer des ressources nécessaires au financement de l’économie réelle. Et en tout cas, le temps est venu d’imposer aux banques centrales et à la BCE de prêter à nouveau directement aux États.

Le sort réservé aux peuples grecs, irlandais, portugais et espagnols est inacceptable. Les « plans de sauvetage » de ces pays ne sont que des plans de sauvetage des grandes banques européennes détentrices des titres de leurs dettes publiques. Ce sont les peuples qui paient la facture avec les véritables plans de destruction sociale que leur impose la Troïka (Banque centrale européenne, Union européenne et FMI) : le chômage frappe 27 % de la population en Grèce et en Espagne, 17 % au Portugal, le niveau de vie moyen de la population a baissé de 35 % depuis 2009 en Grèce.

 4. Un véritable plan de relance européen

Les « réformes structurelles » prônées par les conservateurs et les libéraux sont impuissantes face à la récession. Elles ont même entretenu une logique de déflation salariale qui a tué la demande intérieure européenne. Un New deal européen est désormais à l’ordre du jour. Il doit s’articuler de politiques de soutien à la reprise adaptées à chaque État et d’un plan de relance à l’échelle européenne. Le retour de l’intervention de la puissance publique à tous les niveaux est d’autant plus nécessaire pour financer et planifier la transition écologique.

Il faut permettre à tous les pays de la zone euro de s’orienter vers la relance en faisant sauter les verrous budgétaires qui enferment leurs moyens d’action. En étant coordonnées, les mesures de soutien dans chaque État seraient nettement plus efficaces.

La relance doit également opérer à l’échelle Européenne, pour financer la convergence vers le haut de tous les pays et relancer la croissance dans toute l’union. Le pacte de croissance doit se concrétiser. Pour cela, des euro-obligations pour financer les investissements d’avenir doivent être mises en œuvre. Le capital de la Banque Européenne d’Investissement doit être augmenté, pour lui permettre de développer ses activités de financement de la croissance. Alors que l’épargne est abondante dans certains pays, l’UE doit pouvoir recourir à l’emprunt pour financer ses grands investissements, en particulier pour la transition énergétique, et lutter contre les inégalités territoriales et sociales. L’emprunt, comme instrument majeur du développement et de la croissance en Europe, s’impose comme la contrepartie logique à la mise en œuvre de l’harmonisation fiscale et sociale.

 5.  Refuser la baisse du budget européen

En cohérence avec la volonté affirmée du Président de la République d’une relance macro-économique européenne au service de la croissance et de l’emploi, nous appelons les socialistes européens et notamment nos eurodéputés à refuser par leur vote le budget en baisse pour la première fois, imposé par les gouvernements conservateurs. Ce veto rouvrira la discussion sur la base du budget 2013, moins restrictif que celui actuellement proposé par le Conseil et imposera l’ouverture, dès 2014, année du renouvellement du Parlement européen, du débat sur la levée de ressources propres nouvelles et pérennes, financées par des impôts européens, voire, ultérieurement par des emprunts fédéraux.

Le budget européen représente seulement un pourcent du PIB de l’UE. À termes, la construction d’une Europe de la croissance et de l’emploi implique la mise en place d’un vrai budget d’intégration solidaire, représentant au minimum 5% du PIB européen.

La taxe sur les transactions financières doit être le premier de ces impôts européens. Celle-ci doit être élargie à tous les pays. D’autres ressources propres doivent être créées. Ces dernières pourraient provenir de la lutte contre la fraude fiscale, de la taxation des kilomètres parcourus par les poids lourds, ou encore de la taxation carbone aux frontières de l’UE.

 6. Fiscalité : Une seule solution, l’harmonisation 

Les Socialistes doivent initier un projet européen fiscal, fondé sur la détermination de règles d’harmonisation et sur le transfert d’impôts nationaux vers des impôts européens, au service d’un budget européen.

Pour stopper la concurrence fiscale, il faut harmoniser les fiscalités européennes. Comme nous l’avons fait pour les monnaies, il faut mettre en œuvre un serpent fiscal européen qui rapproche progressivement les niveaux d’imposition. Il serait fondé sur :

– un taux plafond de TVA (impôt consommation) pour éviter une dérive à la hausse de cet impôt injuste ;

–  une harmonisation de l’assiette consolidée de l’impôt sur les sociétés et la définition d’un taux minimal d’imposition des sociétés, pour stopper la course à la baisse et au dumping ;

– l’affectation d’une partie du produit de cet impôt au budget européen ;

–  une obligation de déclarer revenus et bénéfices réalisés dans les paradis fiscaux pour toutes les entreprises et une harmonisation des règles et procédures dans la lutte contre l’évasion et la fraude fiscale ;

– un FACTA (*) européen ;

– une harmonisation des bases d’imposition, pour définir des règles communes et permettre la  revalorisation du budget européen par la création d’un ou plusieurs impôt(s) européen(s) renforçant l’intégration européenne et ses marges de manœuvre.

  7. Mettre la BCE au service de l’économie réelle

Par la force des choses, la BCE est intervenue au cours de la crise, dans les limites autorisées par ses statuts, pour éviter une panne générale de liquidité et enrayer la spéculation sur les dettes souveraines. Pour autant, une réforme de la politique monétaire européenne et des statuts de la BCE doivent doit faire de la croissance et de l’emploi les objectifs prioritaires de la BCE, dans le respect de la recherche d’une inflation contrôlée. L’indépendance absolue de la BCE est sans aucun équivalent dans le monde. Les socialistes doivent promouvoir l’idée d’une BCE responsable devant des institutions communautaires démocratiques.

La BCE doit pouvoir acheter directement lors de leur émission les titres des dettes publiques des États-membres de l’Union européenne, sans que ces États aient à subir les «conditionnalités » prévues par le Mécanisme européen de stabilité, c’est-à-dire les plans de destruction sociale qui frappent la Grèce, l’Irlande, le Portugal, l’Espagne et demain Chypre. C’est ce que font d’ailleurs toutes les banques centrales dans le monde, la Réserve fédérale des Etats-Unis, la Banque du Japon comme la Banque d’Angleterre

 8.  Mettre fin à l’euro surévalué

L’action de la BCE peut aussi influencer le taux de change de l’euro face au dollar. Pour autant, la politique de change ne relève pas du champ de compétence de la BCE. C’est aux États, au sein du Conseil, que revient la mission de fixer le taux de change de l’euro. Le débat sur la politique de change de l’Union est malheureusement resté interdit. Or la surévaluation de l’euro nuit à l’économie et à l’emploi dans la plupart des pays de la zone euro. L’euro ne saurait être une monnaie au service des seuls pays qui réalisent des excédents commerciaux et qui entendent préserver le patrimoine de leurs épargnants grâce à une monnaie trop forte.

La France doit en premier lieu proposer une politique de change à ses partenaires, pour rééquilibrer la  parité avec le dollar mais aussi le yen et le yuan au service de nos exportations. Elle doit non seulement demander que ce point soit mis à l’ordre du jour d’un sommet européen exceptionnel et d’ici fin 2013 mais également présenter un mémorandum visant à stopper la politique de de l’Euro fort, de l’Euro surévalué.

À ceux qui défendent la déflation salariale, une baisse de 10% de la valeur de l’Euro serait plus efficace qu’une baisse équivalente des salaires.

 9. Encadrer le libre-échange, refuser le traité transatlantique.

La politique de change est un instrument de politique commerciale, au même titre que les barrières au libre-échange incontrôlé.

Le libre-échange sans précaution a accru le phénomène des délocalisations. Il entretient une pression à la baisse sur les salaires et mis en cause la protection sociale des pays où le modèle social est le plus avancé. Nous devons tirer les conséquences de cette concurrence déloyale. Il faut réaffirmer la nécessité d’un tarif extérieur commun aux frontières de l’Europe en définissant les critères sociaux et environnementaux nécessaires pour préserver notre modèle social, la qualité de la vie et des emplois rémunérés à leur juste valeur.

Il est temps de proposer un accord européen sur la régulation des échanges de l’UE avec ses partenaires qui permettent l’instauration d’écluses sociales et fiscales.

Il est nécessaire d’avancer vers la taxation du bilan carbone, favorisant de fait les productions les plus écologiques et les plus proches. La création d’une Organisation européenne du commerce, soumettant au Parlement européen des propositions de mise en place de principes de protection (normes, taxes, quotas…) secteur par secteur, permettrait d’harmoniser les normes environnementales.

Il faut enfin suspendre les négociations pour un accord transatlantique. L’industrie européenne n’a rien à y gagner et beaucoup à y perdre. Les Etats-Unis viennent d’injecter des fonds publics considérables pour soutenir certains de leurs secteurs industriels qui, une fois modernisés, seront prêts à conquérir le marché européen. Pendant ce temps-là, L’Europe interdit les aides directes aux entreprises.

La mise en œuvre de l’accord transatlantique va à l’encontre du projet d’une Europe forte et indépendante dans un monde multipolaire. Elle ne saurait tomber dans le piège d’une alliance dite occidentale en face des pays émergents.

D’autres voies de coopération avec les Etats–Unis peuvent être promues mais l’accroissement du tout-concurrence n’est pas acceptable. Entrer dans la négociation nous amènerait à terme à renoncer à une destinée commune aux Européens. Instruits par l’expérience, nous savons que poser les conditions ne permet pas d’aboutir à un accord équitable.

Le droit du travail doit être considéré comme un élément constitutif du droit de la concurrence. La construction d’une véritable organisation européenne, sur le modèle de l’OIT, est indispensable.

 10. Renouer avec l’ambition industrielle pour un développement durable

L’Union doit investir puissamment dans les secteurs d’avenir, en particulier dans les activités à haute valeur ajoutée de la nouvelle économie de la connaissance, développer des infrastructures transeuropéennes d’énergie propre, de transport et de communication. Elle doit favoriser le déploiement d’une politique industrielle, entravée par la logique d’une « concurrence libre et non faussée » dogmatiquement imposée.

Cet État stratège européen doit permettre la transmission dans les territoires, notamment à travers la politique régionale, des orientations décidées en commun, avec pour règle de n’abandonner aucun territoire, aucune région.

Par ailleurs, une véritable politique industrielle doit également assurer une bonne gestion des secteurs plus traditionnels afin d’anticiper les restructurations et mettre en place à temps des programmes de reconversion des bassins industriels, en associant les partenaires sociaux et tous les acteurs concernés.

Il est donc indispensable de repenser complètement la politique industrielle. Tout d’abord en révisant complètement le régime des aides d’État et des règles de concurrence, pour permettre l’émergence de grands groupe européens capables d’affronter leurs homologues dans la concurrence mondiale et maintenir des emplois dans l’UE, d’autre part au sein des États membres en particulier pour les PMI afin d’assurer l’émergence de secteurs innovants, où l’investissement à long terme est indispensable. Cela doit aussi être permis pour assurer la mutation industrielle dans des domaines où  se manifeste un déséquilibre des échanges et une sur-importation.

 11. En Europe aussi, « notre adversaire, c’est la finance » !

Une directive bancaire est actuellement à l’étude. Il est indispensable qu’elle ne soit pas en retrait par rapport au rapport Liikanen.

Les socialistes doivent œuvrer en ce sens et exiger un dépôt rapide par la commission de ces textes.

Seules pourront bénéficier de la garantie publique, les activités bancaires directement utiles à l’économie. En France, par exemple, ces activités représentent 22% des activités des « banques universelles » dont le désastre chypriote vient de démontrer une nouvelle fois l’extrême dangerosité : 12% pour le financement des ménages et 10% pour le financement des entreprises.

On ne saurait par ailleurs accepter que soit différée la mise en œuvre de l’Union bancaire. La plus grande vigilance s’impose pour l’ensemble des marchés financiers en particulier ceux du «secteur bancaire parallèle» comme les fonds monétaires, les assureurs ou les fonds alternatifs qui prospèrent sans être réellement régulés et taxés. Ils constituent un risque de déflagration qui menacera nos économies avec autant de force, si ce n’est plus encore, que la crise bancaire récente.

 12. Une Union démocratique, par et pour les citoyens

Aujourd’hui, la crise en Europe s’est muée en crise de l’Europe. Il faut d’urgence organiser le saut démocratique vers une Europe fédérale et progressiste. Il est donc essentiel de renforcer les pouvoirs du Parlement européen. Afin d’assurer l’effectivité de la légitimité démocratique du Parlement, ce dernier doit nommer la Commission selon les résultats issus des urnes des élections européennes. De même, il faut en finir avec la désastreuse cogestion parlementaire qui brouille le clivage droite-gauche et faire en sorte que la Gauche sociale-démocrate européenne présente son propre candidat à la Présidence de la Commission.

L’Europe ne peut fonctionner comme un espace diplomatique, dans lequel les intérêts des États prévalent sur celui du peuple. La représentation populaire, tant au niveau national qu’au niveau européen, doit être renforcée.

Le rôle de co-législateur du Parlement européen doit être étendu à tous les domaines, la règle de l’unanimité au Conseil des ministres abolie. Les Parlements nationaux doivent être pleinement associés aux décisions budgétaires majeures, telles que les programmes de stabilité et les programmes de réforme.

Les changements de traités doivent faire l’objet d’une Convention, dans laquelle les citoyens sont représentés par leurs élus directs au Parlement Européen. Les peuples doivent pourvoir les ratifier par référendum.

Des paroles aux actes

Longtemps, on a déploré que l’Union se fasse « en dépit des peuples » ou « à côté des peuples». Aujourd’hui, c’est pire : elle se construit contre eux.

Pour les docteurs de la loi libérale, ce sont aux citoyens européens de payer la crise. Grèce, Portugal, Espagne : tous les pays sommés d’appliquer les « recettes » de la Troïka voient leur taux de chômage exploser. La logique folle des partisans de l’austérité se résume en une formule paradoxale : l’Europe redeviendra riche une fois que tous les européens seront devenus pauvres.

Socialistes, nous n’avons pas renoncé à « notre Europe ». Celle qui privilégie la coopération à la compétition. Celle de la construction de « solidarités de fait ». Celle qui investit et prépare l’avenir.

Oui, nous l’assumons : nous portons, avec nos partis frères, un projet alternatif à celui de la droite européenne que nous pouvons faire partager au-delà de nos frontières aux forces progressistes, de gauche et écologistes.

Oui, nous le savons, l’histoire de l’Europe est faite de compromis et de concessions réciproques. Mais on ne passe pas des compromis sans construire un rapport de forces. Accepter une politique néfaste « pour éviter d’ajouter la crise à la crise » non seulement n’évite pas la crise mais l’aggrave. C’est à cela que nous devons nous atteler aujourd’hui : la confrontation démocratique avec la droite européenne qui veut condamner l’Union à l’austérité sans fin.

Nos électeurs, notre base sociale ne se satisferont pas de belles paroles et de grandes promesses. Ils veulent des actes, ils veulent du concret. Ils ont raison. C’est pourquoi nous pensons que le rôle des socialistes Français, à moins d’un an des élections européennes, c’est d’élaborer une feuille de route et de la proposer à nos partis frères.

Nous n’avons pas le temps de laisser « du temps au temps ».

C’est maintenant qu’il faut exiger la suspension du pacte de stabilité budgétaire qui condamne les États membres à l’austérité sans fin.

C’est maintenant qu’il faut un véritable plan de relance, écologique et social en Europe.

C’est maintenant qu’il faut refuser le vote d’un budget communautaire en baisse pour la première fois de l’histoire de l’Union.

 C’est maintenant qu’il faut placer le social d’abord et obtenir un traité social, aller vers un SMIC européen.

C’est maintenant qu’il faut mettre à l’ordre du jour la fin de « l’euro cher » pour protéger nos emplois, nos industries et nos savoir faire.

C’est maintenant qu’il faut refuser le libre-échange généralisé (mettre en place un juste échange  et refuser le traité transatlantique qui risque d’affaiblir un peu plus notre continent sur la scène internationale.

Ensemble, avec toute la gauche européenne, le sursaut, c’est urgent.

(*) Le FACTA est  dispositif connu sous le nom de Foreign account tax compliance Act, adopté par le Congrès américain. Il s’agit de mettre en œuvre un mécanisme d’échange d’informations automatique entre l’administration fiscale américaine et les institutions financières étrangères (FFI) qui gèrent, directement ou non, dans le monde entier, des comptes appartenant à des contribuables américains.


Aucun commentaire »

No comments yet.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.