Je reproduis ci-dessous l’intervention que j’ai faite lors de la session du Conseil régional des Pays de la Loire du 17 octobre.
La politique territoriale de la Région est mentionnée dans le document d’orientation budgétaire dans un paragraphe intitulé : « Soutenir les projets d’investissement locaux dans le cadre de la politique contractuelle ». A l’heure où la Région débat de son avenir autour du thème «Ma Région 2050 », qu’elle prépare son SRADDET, considérer les contrats de territoire comme ayant pour seul but de soutenir les projets locaux montre bien que la majorité actuelle n’a aucun projet régional ambitieux d’aménagement du territoire. Par ailleurs, il n’y a aucun bilan dans ce document sur la nécessité qui a été indiquée aux territoires d’affecter 10% du montant du contrat à la rénovation énergétique. Les territoires semblent avoir des difficultés à respecter cette clause. Pourquoi ? Comment progresser ? Nous ne le saurons pas !
Lors de l’adoption du plan santé régional, nous avions expliqué que le diagnostic, qui sans être nouveau, était juste : des besoins de santé croissants, une tension sur les effectifs des professionnels de santé, leur inégale répartition. Aussi nous ne pouvions qu’approuver plusieurs des mesures présentées dans ce plan. Nous vous avions reproché de porter une vision de la médecine exclusivement libérale. Vous avez un peu évolué, puisqu’initialement vous refusiez de financer tout projet avec des médecins salariés. Ce n’est plus le cas vous avez été amenés à reconnaître que cela peut être une solution souhaitée par les élus locaux et des médecins.
Ce qui cette fois nous fait réagir, c’est que vous nous proposez de poursuivre sans commencer à établir de mise à jour du diagnostic établi lors de l’établissement du plan santé régional. Or vous le savez la crise de notre système de santé n’a fait que s’accroître. La grève des urgentistes depuis plusieurs mois en est un des symptômes. Le manque de médecins dans certains territoires est toujours déploré par les habitants, qui peinent à trouver un médecin référent aussi bien dans certains territoires ruraux que dans certaines agglomérations. La Région n’a certainement pas toutes les réponses à ces différentes situations. Mais n’est-il pas temps de faire à nouveau le point ? Les actions mises en œuvre pour utiles qu’elles soient se révèlent sans doute insuffisantes pour faire reculer les déserts médicaux (ruraux ou urbains). La région doit mettre en lumière les points noirs et interpeller l’Etat pour en commun voir comment répondre aux attentes légitimes des populations concernées.
Le train-train n’est pas de mise sur cette question comme sur celle des pesticides. Dans le bilan à mi-parcours du plan régional santé-environnement PRSE3, un panorama des actions 2016-2018 est présenté publié conjointement par l’ARS et la Région. Il y est signalé à propos de l’exposition aux pesticides que c’est un axe de travail renforcé. Le plan Ecophyto 2 avait pour objectif une réduction de 50% de l’utilisation des pesticides de 2008 à 2018. Ce fut un échec puisque l’utilisation des pesticides loin de baisser a augmenté. Entre 2009 et 2017, le nombre de doses unités (Nodu), nom de l’indicateur qui sert à évaluer l’utilisation des pesticides, a augmenté de 12,4%. Qu’en est-il du plan Ecophyto 2+ ? L’utilisation de pesticides sur notre Région a-t-elle baissée ? Il ne semble pas. Ce devrait être un axe majeur pour la Région. Rien n’est encore dit à ce propos à cette session.
En ce qui concerne la transition énergétique, nous ne pouvons qu’accueillir favorablement l’ambition affichée de se doter d’un plan hydrogène : l’hydrogène peut devenir l’un des piliers d’un modèle énergétique neutre en carbone. La région Pays de la Loire a pris du retard sur cette question. La Région Occitanie, par exemple, a adopté son premier plan Hydrogène dès 2016. Un plan hydrogène doit permettre de soutenir des projets R&D, de co-investir dans des projets concrets, de travailler avec les collectivités à faire émerger des écosystèmes territoriaux locaux en faveur de l’hydrogène produit à partir d’énergie non fossile. Cela doit nous amener aussi à inciter les entreprises et les collectivités à acquérir des véhicules équipés d’une motorisation hydrogène. Dernier point : un plan hydrogène, avec quels moyens ? Rien n’est dit dans le document d’orientations budgétaires de session.
Comment ne pas se réjouir également de la volonté affichée d’élaborer un Programme régional d’efficacité énergétique (PREE) en lien avec les acteurs du bâtiment et du logement « pour permettre de définir les modalités d’accompagnement de la rénovation énergétique chez les particuliers, les bâtiments publics et le petit tertiaire » ? Nous avons à de multiples reprises dénoncé ce qui nous est apparu comme un désengagement de la Région sur cette question (moins 56% des aides régionales aux particuliers de 2016 à 2017). Il est également question d’accélérer le déploiement de plateformes territoriales de rénovation énergétique (PRTE). Bien ! Mais nous attendons toujours le bilan des 4 plateformes existantes en Pays de la Loire (deux en Loire-Atlantique, une en Maine et Loire, une en Vendée).
Je ne reviendrai pas sur tous les aspects d’une nécessaire politique régionale en faveur de l’eau, je l’ai fait lors d’une session précédente. Juste une question : pourquoi le projet Revers’eau n’a-t-il pas été acceptée par la Commission européenne ? Ce projet élaboré avec de nombreux partenaires n’indiquait pas suffisamment, semble-t-il, le rôle de chacun pour cette nécessaire reconquête de la qualité écologique de l’eau en Pays de la Loire. Cela rejoint ce que nous disions en mars dernier, lors du débat sur la prise de compétence « eau » par la Région. On ne peut se contenter d’objectifs généraux, il faut maintenant des « objectifs clairement énoncés au plan régional avec des déclinaisons par secteurs d’activité et par territoires et qui doit se traduire par des contractualisations avec les intercommunalités énoncés ».
Pour finir, je n’ai pas voulu m’attarder sur le rapport développement durable puisqu’il s’agit tous les ans d’un catalogue de pratiquement toutes les actions menées dans l’année écoulée puisque tout est maintenant considéré comme « développement durable » ! Certes en introduction du rapport, il est rappelé une définition succincte du développement durable : « Le développement soutenable est un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs ». Ajoutons que deux concepts sont inhérents à cette notion de développement durable du rapport Brutland : le concept de « besoins », et plus particulièrement les besoins essentiels des plus démunis, à qui il convient de donner la plus grande priorité, et l’idée des limitations que l’état de nos techniques et de notre organisation sociale impose sur la capacité de l’environnement à répondre aux besoins actuels et futurs. « Pour que le développement soutenable puisse advenir dans le monde entier, les nantis doivent adopter un mode de vie qui respectent les limites écologiques de la planète » est-il explicitement écrit dans ce rapport de 1987. Je n’ai pas l’impression que le rapport développement durable qui nous est présenté à cette session ait été écrit en prenant en compte toutes ces dimensions, mais bien plutôt comme un exercice obligé. En commission, un membre éminent de la majorité régionale a même expliqué en présentant ce rapport : « le législateur nous contraint à produire ce rapport ».
En revanche, j’avoue que je prends un petit plaisir à lire tous les ans l’éditorial de ce rapport. Son rédacteur ne doit avoir qu’une seule consigne : il faut y placer le mot « identité ». Quel rapport avec le développement durable ? Peu importe, le mot « identité » est un marqueur fort de la droite régionale. Dans le rapport 2016-2017, Bruno signait un éditorial où il était écrit : « c’est en donnant le meilleur de nos identités et en prenant le meilleur de la modernité que les Pays de la Loire doivent construire leur avenir, avec toutes les forces vives de notre région ». L’année suivante Chtistelle Morançais reprenait la même phrase : « Car nous avons la conviction que c’est en donnant le meilleur de nos identités et en prenant le meilleur de la modernité que les Pays de la Loire doivent construire leur avenir, avec toutes les forces vives de notre région ». Et cette année, toujours le mot identité cette fois-ci présentée un peu autrement : « Préservation de la richesse de notre biodiversité, de notre faune, de notre flore et de nos paysages qui forgent notre identité et notre attractivité ». Comme quoi, il y a bien une vision de droite et une conception de gauche du développement durable !