Le numéro 50 de la revue Place Publique (mars-avril 2015) vient de paraître. Elle publie une contribution que j’ai écrite en tant que président d’Air Pays de la Loire (Place Publique n°50, « Air Pays de la Loire, la vigie de l’air »). Je la reproduis ci-dessous.
Air Pays de la Loire vient d’emménager dans de nouveaux locaux (Europarc de la Chantrerie à Nantes) en ce début d’année 2015. Saisissons cette occasion pour faire le point sur le rôle de cet organisme dans la surveillance de la qualité de l’air mais aussi sur l’aide qu’elle apporte aux collectivités sur les thématiques air-climat-énergie.
C’est la loi sur l’air et l’utilisation rationnelle de l’énergie du 30 décembre 1996 (LAURE ou encore loi Lepage) qui a précisé et élargi le rôle des associations agréées de la surveillance de la qualité de l’air (AASQA) aujourd’hui regroupées nationalement au sein d’une fédération, ATMO France. Dotées du statut d’association à but non lucratif, agréées par le ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie (MEDDE), ces associations régionales sont constituées de représentants de quatre groupes de partenaires : Etat, collectivités locales, industriels locaux émetteurs de pollution atmosphérique, associations et personnalités qualifiées. Cette composition tripartite et équilibrée garantit depuis plus de 30 ans objectivité et indépendance à Air Pays de la Loire, et lui confère une forte crédibilité auprès des citoyens et des décideurs locaux. Près de 25 salariés, principalement ingénieurs et techniciens, exercent cette activité de surveillance de l’air que nous respirons dans notre région.
Des mesures permanentes des polluants de l’air
Air Pays de la Loire a disposé des appareils de mesure sur 31 sites répartis sur l’ensemble de la région. Sur ces sites (urbains, périurbains, de trafic, industriels et ruraux), Air Pays de la Loire effectue 70 mesures 24h sur 24. Pour compléter ces informations, des campagnes de mesure sont également organisées, notamment pour l’évaluation de la pollution à proximité de voies de circulation, la surveillance ou l’impact de zones industrielles. Les polluants réglementés sont suivis et comparés aux valeurs limites s’appliquant aux oxydes d’azote (produits principalement par le trafic routier et les installations industrielles de combustion), aux particules fines (émises par les véhicules ou poids lourds diesel, la combustion du bois, les activités industrielles ou énergétiques, les épandages agricoles), au dioxyde de soufre (principalement d’origine industrielle), au monoxyde de carbone (présent notamment dans les gaz d’échappement des véhicules à moteur essence), au benzène (issus des véhicules essence et de diverses activités industrielles) et à l’ozone (lié par transformation photochimique aux automobiles et aux industries). La pollution de l’air est bien sûr un enjeu de santé publique. Elle a été classée cancérogène par le Centre international de recherche sur le cancer de l’Organisation mondiale de la santé (CIRC/OMS) pour plusieurs polluants. L’être humain respirant 15 000 litres d’air par jour, l’exposition chronique a plus d’effets que les épisodes de pollution. Une mauvaise qualité de l’air peut être responsable de maladies respiratoires et cardiovasculaires. On estime que l’inhalation de particules fines est responsable de 42 000 décès prématurés par an en France.
Des résultats en continu sur internet
Si l’activité principale d’Air Pays de la Loire consiste à effectuer des mesures, l’objectif est bien sûr d’informer le public et les autorités compétentes par la publication rapide et fréquente des résultats obtenus, notamment sur son site internet (www.airpl.org). Chaque jour, un indice de qualité de l’air est publié. Il caractérise de façon simple et globale la pollution atmosphérique de fond des zones urbanisées. Compris entre 1 (très bon) et 10 (très mauvais), cet indice est égal au maximum de quatre sous-indices, chacun d’entre eux étant représentatif d’un polluant de l’air : dioxyde de soufre (SO2), dioxyde d’azote (NO2), ozone (O3) et particules fines (PM10).
Des pics de pollution malgré une situation atmosphérique régionale tempérée
La pollution de l’air a des origines diverses : résidentiel-tertiaire (chauffages), secteurs productifs (industrie, agriculture, BTP,…) ; transports, mais aussi des sources naturelles (volcans, sables,…). Des pics de pollution malheureusement peuvent se produire en été avec une pollution par l’ozone par temps calme et ensoleillé, et ce sur une grande échelle. On peut rencontrer le même problème en hiver avec une pollution par les particules fines par temps froid anticyclonique. Jusqu’à présent, les alertes étaient déclenchées une fois le pic de pollution constaté. En 2015, les procédures de gestion de ces pics de pollution seront basées sur des prévisions (24h à l’avance) et non plus des constats. Un déclenchement de procédures se fera à l’échelle départementale, avec des mesures prévues par arrêté préfectoral. C’est bien évidemment Air Pays de la Loire qui informe les autorités et les médias lors de ces épisodes de pollution. En fonction des prévisions, il peut être émis de simples recommandations au grand public et à des publics ciblés (industriels, agriculteurs,..) ou au niveau d’alerte, des mesures programmées ont vocation à être mises en œuvre (réduction de la vitesse maximale des véhicules routiers par exemple).
Air Pays de la Loire transmet à l’Union européenne, via le ministère en charge de l’Ecologie, les niveaux de qualité de l’air sur la superficie des zones surveillées et le nombre d’habitants exposés à des dépassements de valeurs réglementaires visées par la Directive 2008/50/CE. Le Plan de surveillance de la qualité de l’air des Pays de la Loire (PSQA 2010-2015) prévoit la réalisation de cartographies des niveaux annuels des principaux polluants atmosphériques dans les quatre agglomérations de plus de 100 000 habitants de la région (Nantes, Saint-Nazaire, Angers et Le Mans). Elles font ressortir des niveaux de polluants modélisés plus élevés évidemment à proximité des axes à fort trafic. A Nantes, Angers et Saint-Nazaire, la part de la population exposée à des dépassements de valeurs limites pour le NO2 serait inférieure à 2%. Ces pourcentages sont proches de ceux calculés pour les autres agglomérations françaises de taille semblable.
Des calculs et des cartographies pour aider à la prise de décision
Ces modélisations effectuées par Air Pays de la Loire constituent des outils d’aide à la décision pour d’éventuels projets d’aménagement et de développement des agglomérations. Ce rôle auprès des collectivités est une de nos activités en développement. C’est le cas, par exemple, lors de l’élaboration du Plan de protection de l’atmosphère (PPA) sur le pôle métropolitain Nantes/Saint-Nazaire avec l’apport par Air Pays de la Loire d’éléments d’information sur l’évolution à moyen terme des émissions polluantes et de la qualité de l’air. Ce PPA, obligatoire dans les agglomérations de plus de 250 000 habitants, est un plan d’actions destiné à maintenir ou ramener les concentrations en polluants dans l’atmosphère à un niveau inférieur aux normes réglementaires. Quinze zones en France sont en contentieux en 2014 aux yeux de l’Union européenne pour des dépassements en particules fines, un autre contentieux se profile pour les oxydes d’azote (NOx). L’agglomération Nantes/ Saint-Nazaire n’est pas, pour l’instant, concernée par ce contentieux européen. La révision de ce PPA, applicable sur 58 communes, a mis l’accent sur la nécessaire réduction de NO2. Il s’agit de baisser la pollution liée à la mobilité et à l’urbanisme (actions visant à réduire les déplacements), et la pollution liée à des sources fixes (industrielles, agricoles, résidentielles…). Ce PPA affiche une complémentarité avec les autres plans : plans de déplacement urbain (PDU), plans locaux d’urbanisme (PLU), schéma de cohérence territoriale (SCOT). Les travaux d’Air Pays de la Loire ont porté sur un diagnostic de la qualité de l’air (émissions 2008 et concentrations jusqu’en 2012, une étude tendancielle 2015). Un scénario 2020 a été également réalisé afin d’évaluer la situation en termes d’émissions et de concentrations à plus long terme. Le PPA doit permettre de réduire la population exposée à des valeurs limites en NO2. Avec les actions mises en œuvre dans le cadre du PPA, il a été estimé qu’en 2015, moins de 0,5% de la population totale de la zone PPA y serait exposée. En 2020, cette tendance se confirme avec la totalité de la zone passant en deçà de la valeur limite.
Des inventaires au service de la transition énergétique
La montée des enjeux liés à l’énergie et au climat, conjuguée à la prise en compte de l’ensemble des problématiques atmosphériques, a conduit Air Pays de la Loire à inscrire dans sa stratégie une approche intégrée air-climat-énergie. Avec le soutien financier de l’Ademe, du Conseil régional et de l’Union européenne et de ses membres, Air Pays de la Loire a développé l’outil Basemis. Il s’agit d’un inventaire communal des émissions de polluants et gaz à effet de serre (GES) et des consommations énergétiques de la région des Pays de la Loire. Basemis se révèle un outil précieux pour accompagner les collectivités dans l’élaboration de Plans climat énergie territoriaux (PCET).
Air Pays de la Loire a également apporté son aide technique pour la réalisation du Schéma régional du climat, de l’air et de l’énergie (SRCAE) co-piloté par le préfet de Région et le Président du Conseil régional. Un tel schéma vise à définir les orientations et les objectifs stratégiques régionaux en matière de réduction des émissions de GES, d’économies d’énergie, de développement des énergies renouvelables, d’adaptation au changement climatique et de préservation de la qualité de l’air. Après des états-généraux de l’énergie associant de nombreux partenaires, le conseil régional en a profité pour adopter sa stratégie régionale de transition énergétique. Diviser par deux la quantité d’énergie consommée à l’horizon 2050, par quatre les émissions de gaz à effet de serre, stabiliser la consommation électrique et produire l’équivalent en volume avec des énergies renouvelables issues du territoire, réduire fortement la dépendance du secteur des transports à la consommation de pétrole : c’est l’ambition de la transition énergétique en Pays de la Loire à l’horizon 2050. Cela aboutit à la mise sur pied d’un dispositif régional d’observation énergie-climat (DROPEC), piloté par l’Etat, le Conseil régional et l’Ademe, qui s’appuie fortement sur l’expertise technique et les données produites dans Basemis par Air Pays de la Loire.
Des actions au plus près des expositions aux polluants
La question de la qualité de l’air intérieur est aussi une préoccupation majeure de santé publique, car l’ensemble de la population est concerné. Nous passons 80% de notre temps en espace clos ou semi-clos (logements, lieux de travail, écoles, espaces de loisirs, commerces, transports, …). L’air que nous y respirons peut avoir des effets non seulement sur le confort mais aussi sur la santé, depuis la simple gêne (irritation des yeux et de la peau) jusqu’à des pathologies comme les allergies respiratoires. C’est pourquoi Air Pays de la Loire mène aussi des campagnes de mesure dans des établissements recevant du public afin d’évaluer la qualité de l’air intérieur (lycées, écoles,…).
Les allergies aux pollens sont en constante augmentation. A Nantes (comme à Laval), il existe un jardin Pollinarium sentinelle, situé au jardin des Plantes. C’est un espace composé d’espèces allergisantes rassemblées selon une méthodologie scientifique et dont la pollinisation est surveillée quotidiennement. Cela permet aux personnes allergiques aux pollens et aux médecins d’avoir connaissance de la pollinisation des espèces allergisantes dès l’apparition des premiers grains de pollens dans l’air. « L’Alerte pollens » est une lettre d’information électronique qu’Air Pays de la Loire envoyée à plus de 3000 habitants de la région qui ont demandé à la recevoir.
Enfin les mesures en zones agricoles des polluants amenés par les traitements phytosanitaires font aussi l’objet d’investigations.
RT @ericthouzeau: Air Pays de la Loire, la vigie de l’air http://t.co/8HWwCaY5ld