Le Centre d’Histoire du Travail (CHT) de Nantes publie courant octobre un livre de Xavier Nerrière intitulé « Images du travail » rassemblant plus d’une centaine de photographies issues des archives du CHT. À travers ces photographies, l’objectif du livre est de s’interroger sur la façon dont les ouvriers s’approprient leur propre image, renvoyée par des photographies prises par des personnes extérieures aux classes populaires, mais aussi en se photographiant eux-mêmes. « Les classes dominées ne parlent pas, elles sont parlées » disait le sociologue Pierre Bourdieu. La classe ouvrière d’hier et le salariat d’aujourd’hui sont-ils nécessairement condamnés à une image sociale construite essentiellement par les représentations des dominés véhiculées par les classes dominantes ? Pour l’auteur, il est important de voir aussi comment les ouvriers se sont eux-mêmes emparés de la photographie et de leur image. Il invite à une histoire populaire de la photographie. L’ancien syndicaliste que je suis est totalement convaincu de l’intérêt de ce livre. Et parce que je suis socialiste, je pense absolument nécessaire pour le salariat de travailler à sa construction en tant que classe sociale face au Capital. Pour passer, comme le disait Marx, de « la classe pour soi » (intérêts communs) à « la classe en soi » (avoir conscience de ces intérêts communs), cela nécessite de se représenter socialement. L’ouvrage de Xavier Nerrière y contribue.
La présentation publique de ce livre aura lieu Jeudi 9 octobre à 18h30 à la salle d’exposition de la Maison des hommes et des techniques. J’ai proposé à Xavier Nerrière de nous présenter son livre, ce qu’il a accepté. Je l’en remercie et reproduis donc ci-dessous le texte qu’il m’a adressé. E.T.
En matière de photographie du monde du travail, nous connaissons les images de Robert Doisneau, Henri Cartier-Bresson, Willy Ronis ou, avant eux, François Kollar. Les plus férus pourront citer les travaux de Walker Evans et Lewis Hine aux Etats-Unis et, plus tard ceux des allemands Hilla et Bernd Becher. Mais qu’en est-il de l’image que les ouvriers, les salariés, ont d’eux-mêmes ? Comment se voient-ils, comment se photographient-ils, comment s’emparent-ils des images d’eux-mêmes réalisées par des personnes extérieures à leur milieu ? Lire la suite…