Ma mère, Lucette Thouzeau, âgée aujourd’hui de 85 ans, a connu les bombardements de septembre 1943 à Nantes. Voilà ce qu’elle en dit aujourd’hui :
« J’avais 16 ans. Je travaillais comme modiste dans le quartier de Pont-Rousseau à Rezé, rue Alsace-Lorraine. Comme les représentants ne passaient plus du fait de la guerre, ma patronne m’a demandé d’aller à la « maison du ruban » chercher des fournitures dans le centre ville de Nantes. C’était le 16 septembre 1943. Vers 16 h, après avoir fait les courses demandées, je suis allée Place Royale pour prendre le tramway et rentrer à Rezé. Les sirènes se sont mises à hurler. J’ai couru chez une amie de mes parents qui était concierge et habitait Place Royale. Ernestine était originaire du même village de Vendée que mon père. Elle est allée ouvrir sa cave dans le sous-sol pour que les gens qui se précipitaient alors dans l’immeuble puissent se mettre à l’abri. Tous n’ont pas pu trouver de place, et certains sont restés dans le hall. Pour ma part, j’avais trop peur, j’ai refusé de descendre et je suis restée dans la loge.
Les bombes semblaient exploser de partout. Impossible de dire aujourd’hui combien de temps cela a duré.
Quand je suis sortie, la place semblait dévastée. Une charrette à cheval d’un livreur se trouvait devant le café de la place Royale. La charrette était intacte, avec ses bouteilles, le cheval lui gisait éventré.
Ernestine m’a ramenée à pied jusqu’à la chaussée de la Madeleine. Près de l’Hôtel-Dieu, tout semblait détruit. Je suis rentré à Pont-Rousseau en courant.
Quand Ernestine est revenue chez elle, elle n’a pas pu rentrer dans son logement. Le feu avait pris, à partir de la pharmacie de Paris située en face, et s’était propagé par les toits. Elle n’a rien pu récupérer de ses affaires. Tout comme ma tante Valentine, qui habitait tout près. J’avais expliqué à mes parents que l’immeuble où elle habitait était intact. Le lendemain, nous avons appris qu’elle aussi avait tout perdu, son appartement ayant brulé.
Une semaine plus tard, le 23 septembre, j’étais chez mes parents (à Rezé) quand il y a eu à nouveau un bombardement. Effrayée, je me suis mise à trembler. Mes parents ont aussitôt décidé de partir dès le lendemain, à vélo à Grand-Landes (Vendée) où la mère de mon père avait une petite maison. Cette maison avait une pièce unique, il n’y avait ni électricité et ni eau courante. Ma mère, mes deux sœurs, ma grand-mère et moi, nous y sommes restées jusqu’à la fin de la guerre. Mon père travaillait aux chantiers à Nantes, il nous rejoignait en fin de semaine… en vélo. »
À Nantes, les bombardements américains de 1943 ont fait 1 463 morts et 2 500 blessés. 700 maisons et immeubles ont été détruits et près de 3 000 rendus inhabitables.
Merci à ta mère qui confirme ce que la mienne ( 93ans aujourd’hui)a vécu et qui a conduit à ce que je naisse à RIAILLE(44) et non Nantes
Ce jour-là comme tous les autres, ma grand-mère travaillait dans la boulangerie d’en haut des marches du bon pasteur, celle qui jouxtait la maison close. Lorsque les sirènes retentirent, le boulanger envoya toute sa famille et son personnel à la cave. Mais Gilberte, forte tête, refusa et marcha jusqu’à retrouver sa mère au domicile familial rue Léon Jamin. Grand bien lui prit; une bombe tomba sur la boulangerie, et l’ensemble des occupants périrent.