En 2014, les commémorations de la Grande Guerre (1914-1918) ne manqueront pas. Plutôt que le souvenir des fauteurs de guerre, c’est l’action de celui qui a tout fait pour l’empêcher que je souhaite invoquer : celle de Jean Jaurès assassiné le 31 juillet 1914 (Voir aussi l’article de Presse-Océan du 30 juillet « pourquoi l’ont-ils tué ?)
L’actualité de Jaurès
Pacifiste, Jean Jaurès considérait qu’ « il n’y a qu’un moyen d’abolir la guerre entre les peuples, c’est abolir la guerre économique » (1), car la société capitaliste « porte en elle la guerre, comme une nuée dormante porte l’orage» (2). Acteur de la lutte des classes, Jaurès s’est rendu célèbre par son combat aux côtés des mineurs de Carmaux, au cri de « tout pour le Travail et pour la République sociale » (3). Humaniste, Jaurès s’est indigné du sort fait à Dreyfus, « témoin du mensonge militaire de la lâcheté politique, des crimes de l’autorité » (4). Laïque, Jaurès considérait que « laïcité et démocratie sont identiques » et que « c’est sur des bases laïques que la démocratie doit constituer l’éducation » (5). Engagé aux côtés des travailleurs, Jaurès est aussi le défenseur du droit à la retraite car « il est scandaleux que dans une société humaine les hommes épuisés par une vie de travail soient exposés à la pire misère, à l’entier dénuement » (6). Dès 1898, Jaurès se déclare favorable au suffrage féminin. C’est aussi le défenseur de l’impôt : « si la démocratie tient à la réforme fiscale, c’est parce qu’elle en espère un premier redressement des inégalités sociales » (7) ; mais la réforme fiscale « ne saurait suffire car elle ne touche pas au principe même de l’iniquité, c’est-à-dire l’appropriation exclusive des moyens de production par une minorité privilégiée » (8). Enfin, socialiste, Jaurès a été l’unificateur de tous les groupes de gauche au sein de la SFIO en 1905 en défendant une unité respectueuse « faite de la dignité antérieure de chacun de nous » (9).
L’idéal et le réel
Il n’est pas question de vouloir, en relisant aujourd’hui Jaurès, trouver toutes les réponses que la gauche se doit de fournir en ce début de 21e siècle, par exemple face aux formes actuelles de la financiarisation ou en matière environnementale. Mais parce que la gauche toute entière se reconnaît dans cette grande figure du mouvement ouvrier, il est peut-être possible aujourd’hui de rouvrir des lieux de débat entre toutes celles et tous ceux qui font vivre l’idée de transformation sociale. Face aux replis identitaires, aujourd’hui comme hier, il est nécessaire de bâtir un projet d’émancipation, qui ait le courage « d’aller à l’idéal et de comprendre le réel »(10) en s’adressant notamment aux jeunes générations comme Jaurès l’avait fait en son temps.
2014 : une année Jaurès ?
Militants syndicaux, militants politiques de la gauche, historiens, artistes : si nous faisions de 2014, à Nantes, en Loire-Atlantique une année Jean Jaurès ? Colloques, réunions, débats, spectacles… Un foisonnement d’initiatives est possible avec me semble-t-il un fil conducteur : débattre et rassembler à gauche sans exclusive afin de construire des éléments de réponse face à un capitalisme toujours bien actuel. Il ne faut jamais oublier « pourquoi ils ont tué Jaurès ».
(1) 7 mars 1895, à la Chambre des communes, dans Jean Jaurès : Textes choisis, éd. sociales, paru en 1959, p. 88.
(2) 7 mars 1895, à la Chambre des communes, dans Jean Jaurès : Textes csis, éd. sociales, paru en 1959, p. 88.
(3) Le Combat, Le Cri des Travailleurs du tarn, 20 mars 1898, in Œuvres de Jean Jaurès Tome 6.
(4) Jaurès, La parole et l’acte, Madelaine Rébérioux, p.63
(5) Discours de Castres, 30 juillet 1904 (source LHuamnité 2 août 1904, réimprimé dans l’édition du 9 décembre 2005
(6) La Petite République, 13 novembre 1897, in Œuvres de Jean Jaurès Tome 6.
(7) Vues politiques, la Revue de Paris, 1er avril 1898, in Œuvres de Jean Jaurès Tome 6.
(8) Vues politiques, la Revue de Paris, 1er avril 1898, in Œuvres de Jean Jaurès Tome 6.
(9) Discours de Jaurès au Congrès de Toulouse en 1908.
(10) Discours à la jeunesse, Toulouse, 1892
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Pacifiste certainement, mais aussi démocrate et républicain. C’est à lui que l’on doit la seule contribution notable d’un responsable de la Gauche que l’Histoire ait retenue sur l’organisation d’une armée de citoyens (« L’Armée nouvelle »). Au sortir de l’affaire Dreyfuss, ce livre a ajouté à la haine éprouvée par les nationalistes pour l’homme et la vérité ; ce qui contribue à expliquer l’acquittement de son assassin en 1919, après cinq ans de prison.
Un grand Homme un tribun hors pair, un humaniste, pacifiste auquel nous rendons un vibrant Hommage à l’occasion du centenaire de son assassinat.