RSS Feed

Redistribuer les richesses

Écrit le 5 août 2012 par Éric Thouzeau

Nul ne sait si l’automne sera chaud. Chacun sait que l’été l’est déjà. Il n’est bien sûr pas question de météo, mais bien de l’actualité sociale et économique : licenciements dans l’industrie, état des  finances publiques et crise de la dette  en Europe.

Du mythe de la « société post-industrielle » à celui de « l’entreprise sans usine », en passant par celui de la « nouvelle économie », l’idéologie libérale dominante a permis de cacher pendant trop longtemps la désindustrialisation de notre pays. Les délocalisations, les pertes d’emplois et de savoir-faire ont été dénoncées. Beaucoup moins que la disparition de la majeure partie des entreprises grandes et moyennes véritablement indépendantes des grands groupes (rachat de PME, sous-traitance,..). Or, les grands groupes ne sont plus que des structures guidées par des considérations actionnariales, financières et fiscales. Pas par des stratégies industrielles ! Redynamiser le tissu productif régional sera un des rôles de la Banque publique d’investissement. Les régions devront y prendre toute leur place. Les Pays de la Loire y sont prêts !

Investir davantage en recherche et développement,  aider à l’émergence de secteurs de haute et moyenne technologie est sans doute nécessaire. À condition que les innovations ne soient pas seulement  technologiques, mais aussi sociales. Le travail d’un nombre croissant de salariés s’est enrichi, nécessitant un niveau de qualification plus élevé. Avec des conditions de travail qui se sont dégradées car de plus en plus stressantes. Or le patronat français a réussi le tour de force de faire pratiquement disparaître toute vraie  négociation sur les conventions collectives qui devraient organiser la reconnaissance des qualifications et des classifications. Contrairement à l’Allemagne, où les organisations syndicales de salariés ont sauvé (en partie) leur pouvoir de négocier une progression salariale liée à la compétence. En France, décrocher du SMIC peut prendre 20 ans dans certaines conventions collectives dont les  minima sont inférieurs au SMIC. La puissance publique doit y mettre de l’ordre. C’est notre devoir de socialistes de ne pas trop tarder à le faire.

La consommation populaire marque le pas. Il ne faut pas attendre la relance pour augmenter les salaires, mais il faut les augmenter pour permettre la relance. Le défaut de compétitivité de l’industrie française, par exemple, est plus dû à un manque de compétitivité hors coût qu’à celui de la compétitivité-coût.  Autrement dit, l’insuffisance d’innovation et  de qualité est souvent un handicap plus grand pour les produits français que leur seul prix. D’autant que le coût du travail dans la zone Euro, à l’exception de l’Allemagne et de l’Autriche, a augmenté de façon plus importante qu’en France (par exemple aux Pays-Bas et en Finlande) entre 2000 et 2010.  En revanche, la politique de l’Euro fort de la BCE a eu de graves conséquences : au cours de cette même période, le coût horaire du travail dans l’industrie française n’a augmenté que de 32% en euros mais de 90% en dollars (*) !

La France « d’en haut » est très riche. Les plus riches, ceux que le sarkozysme avait privilégiés, doivent être mis à contribution. De même que les grands groupes. C’est ce que le gouvernement de Jean-Marc Ayrault a commencé à faire. Faut-il pour autant maintenir l’objectif de revenir à un déficit inférieur à 3% du PIB en 2013 ? Faire des économies, partout où c’est possible, bien sûr. Mais la révision générale des politiques publiques (RGPP), au lieu de moderniser l’action de l’État, l’a déjà profondément désorganisée. Il ne faudrait  pas prendre le risque d’en rajouter !

La soi-disant orthodoxie budgétaire, en fait l’austérité généralisée au continent européen, entraîne toute la zone euro dans une spirale dépressive. Le 6 mai dernier, les français ont voté contre cette conception portée par Merkel et Sarkozy. François Hollande a permis que s’ouvre un débat sur la croissance en Europe. Mais pour les libéraux et les conservateurs, la croissance passe par une dérégulation accrue du marché de la force de travail. De sommet en sommet de la « dernière chance » pour l’euro, la crise se poursuit. Les spéculateurs ne lâchent pas  prise. Le traité pour la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) appelé aussi « pacte budgétaire » répond à une logique qui amène les pays européens les uns après les autres à la crise. En fixant à 0,5% le déficit structurel annuel autorisé des administrations publiques, le TSCG risque de rajouter de la récession à la récession. Pourtant la réponse n’est pas moins d’Europe. Au contraire ! Mais une Europe fédérale, avec un budget fédéral, ne sera acceptée par les peuples que s’il s’agit d’une Europe de l’harmonisation sociale et fiscale, avec des institutions démocratiques. Le « pacte budgétaire » lui tourne le dos.

La mise en œuvre d’une politique de croissance est nécessaire au plan européen et au plan national. Elle doit répondre à l’incontournable transition écologique avec une substitution  progressive des énergies renouvelables au pétrole et au nucléaire. Cette transformation profonde de notre société doit tourner le dos à une économie financiarisée qui n’a fait qu’accentuer les inégalités de revenus, au profit des actionnaires et des rentiers. La redistribution des richesses (par les salaires , par la fiscalité…) reste la mission historique des socialistes !

 (*) Alternatives économiques : Comment sauver l’industrie ? (Hors-série n°93)

 


3 Comments »

  1. Gérard Fradet dit :

    Pleinement d accord ,mais combien sommes nous a penser comme toi , très peu !
    Une fois ça fait mal ! Deux fois bonjours les dégâts !
    Enfin soyons optimistes ……
    Gerard

  2. Vince dit :

    On pourrait par exemple redistribuer les dividendes que VINCI
    va ramasser avec l’Ayraultport.

  3. redcloud dit :

    Le site de PSA devrait-être le laboratoire de la reconstruction industrielle Française, en organisant les ouvriers en SCOOP et en préemptant l’outil de travail, nous avons les moyens, de construire la voiture Française la moins polluante en émissions de CO2 et en particules.Il s’agit ce recréer un écosystème industriel qui enfin profite aux travailleurs et consommateurs et non plus à de riches familles et actionnaires.Notre parc automobile peut-être renouvelé avec du made in France qui soit à la fois abordable et plus propre.Pour cela il faut un consensus des gauches et une volonté politique du PS.L’écologie est au service de tous, il faut passer au 21e Siècle, le travail en équipe à fait notre victoire, il faut continuer!!!

Répondre à Vince Annuler la réponse

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.